Dicila 4 carte blanche clement roussel 0004 leandre leber dicila 1

Clément Roussel, la géométrie et le dépouillement humain au service du beau

Le 29/06/2022 0

Dans Carte blanche

Avec son  approche solitaire et géométrique du monde, le photographe amiénois Clément Roussel nous propose une carte blanche reflétant sa personnalité et mettant l’émotion au cœur. Le Samarien a derrière lui un riche parcours qui a forgé son style photographique. 

C’est dès l’enfance que Clément Roussel, natif d'Hangest-sur-Somme entre en contact avec la photographie. “Je devais à peine avoir dix ans quand mes parents m’ont offert mon premier appareil numérique. J’avais organisé une sorte de studio dans ma chambre en tirant des draps noirs. Je me souviens avoir fait une reproduction de la Liberté guidant le peuple, mais à la place du drapeau, j’avais mis une canette de Coca-Cola, créant une sorte de photo publicitaire.” explique t-il. Le jeune samarien ne savait pas encore à cette époque, que son parcours professionnel l'ammenerait à faire ce type de photographie pour gagner sa vie. 

Une rencontre fortuite

Comme tous les midis durant ses années lycée au Sacré-Coeur d’Amiens, Clément allait se restaurer au feu Café des Moulins. L’épreuve du baccalauréat approchant, il est toujours en indécision sur son futur. Lui qui se rêvait ornithologue mais qui a rapidement déchanté en voyant le nombre d’années d’études pour concrétiser ce rêve, fait une rencontre soudaine et décisive. “Il s'avère que ce jour là, je m’étais fait tirer des planches contact chez Flandres route d’Abbeville. J'étais attablé au Moulin en train de regarder mes tirages. Un gars est venu me voir et m'a demandé si je faisais de la photo. Il a regardé mes négatifs et m’a dit que j’avais quelque chose. Après qu’il soit partit, le gérant du café m’a appris que ce monsieur était directeur de la photo dans le cinéma, je me suis donc dit que j’avais vraiment un truc.” indique t-il.

Conforté dans sa pratique par cet homme sorti de nul part, le Samarien postule au BTS photographie du Lycée Jean-Rostand à Roubaix. Il est accepté et obtient son baccalauréat scientifique. “J’avais aussi été accepté au BTS photo de Louis Lumière à Paris, mais j’ai préféré celui de Roubaix, car il venait d’ouvrir, il y a avait donc plein de matériel neuf et je ne me sentais pas trop de vivre dans la capitale.” souligne l’Amiénois.

Lors de ses deux ans de formation, il apprend beaucoup, surtout sur le terrain. “J’ai fait de nombreux stages notamment chez Fujifilm et chez 3 photographes différents. L’un d’entre eux, Pascal Lefebvre, faisait des photos de pub et de mode, j’ai eu un énorme coup de cœur pour ça. Je passais énormément de temps au studio, même après les cours, j’allais passer un coup de balai, il me donnait un p’tit biffeton. À la fin de mon BTS, il partait à la retraite et m’a proposé de reprendre son studio. Mais à l’époque, j’avais aussi une proposition pour travailler sur Amiens et ma mère avait des problèmes de santé, j’ai préféré la deuxième option.” dit-il. 

Dicila 4 carte blanche clement roussel 0006 leandre leber dicila

Retour à Amiens

Clément commence alors sa carrière professionnelle chez un photographe amiénois, faisant principalement du portrait, des photos de mariage ou encore des photos scolaires. “Je me suis rapidement rendu compte que c'était un travail qui ne me plaisait pas du tout. Je suis quelqu’un d’assez solitaire, un peu renfermé sur moi même et ce contact aux autres à travers le portrait etc ne me convenait pas.” Après cette expérience qui ne l’a pas satisfait, Clément, en quête de liberté, décide de se lancer à son compte. “À partir de là j’ai démissionné pour être indépendant. J’ai pu commencer grâce à la couveuse d’Amiens. L'expérience a duré quatre ans, je me suis éclaté à cette période. C’est à ce moment-là que j’ai rencontré ma compagne, on s’est installés à Compiègne. Je travaillais beaucoup entre Lille et Paris donc le lieu était parfait. J’ai fait beaucoup de photos institutionnelles, notamment pour la ville d’Amiens, j’ai fait quelques prestations pour Air France c’était une période riche en expérience”. 

 

Grâce à ses divers contrats pour des clients de renom, le Samarien commence à avoir de sérieuses propositions. Sarenza, qui est en plein lancement à l'époque, et pour qui, l’Amiénois avait déjà travaillé, lui fait une proposition d’embauche. Après un premier refus de sa part, la société revient à la charge. “À cette époque, j’étais toujours en déplacement, à droite, à gauche. Accepter cette offre me permettait d’avoir un peu plus de stabilité.” Il se lance alors et participe activement à la croissance exponentielle de l’entreprise, qui aujourd’hui, est un grand nom français. “Je suis resté  là-bas un peu plus de six ans. Je suis arrivé aux balbutiements de la société, dans mes souvenirs, j’étais le quarante-neuvième salarié. Je faisais de la photo publicitaire, des photos de mode etc.... On avait monté un studio dans la zone logistique qui était à l’époque située à Beauvais. C'était une expérience extrêmement riche, humainement et professionnellement.” Le photographe arrêtera sa collaboration avec l’entreprise pour rester proche de sa fille, porteuse d’une maladie rare. Il décide de se stabiliser pour s’occuper d’elle et occupe depuis quatre ans, un poste de conseiller financier qu’il partage avec la photographie. 

 

En 2021, Le Crédit Agricole lui propose de monter une expo au Stade de La Licorne, ce qui le poussera à se relancer dans sa passion qu’il avait un peu délaissé. “L’expo a cartonné, ça m'a remis du baume au coeur. Pendant toutes ces années je faisais de la photo pro, là c’était mes photos persos qui étaient affichées." 

Dicila 4 carte blanche clement roussel 0010 leandre leber dicila

Le dépouillement et la géométrie

Clément Roussel se définit comme un photographe urbain. Ses clichés sont souvent des rencontres hasardeuses avec un détail, une symétrie éclatante ou un moment de grâce que peuvent offrir les rues d’une ville. Il a développé au fil de ses années de pratique un style particulier qui est également une projection de sa personnalité.  “Je suis très solitaire dans l'âme. En vacances par exemple, j'aime bien m’isoler loin avec ma famille. Naturellement, en photo je me réfugie vers un monde humainement aride comme on peut le voir dans la carte blanche.” Il n’y a que très peu de personnages qui apparaissent sur les clichés du Samarien. “Sur certaines photos on peut voir des humains, mais la personne va être de dos. Parfois, je trouve que l’humain amène quelque chose, mais de manière détournée. Par exemple, sur la photo du Tréport, je me suis dit que j’allais forcément la faire en pose longue pour avoir une sorte de brouillard de personnes”. À l’exception de son cliché du Tréport, de celui mettant en scène un bras de la Somme avec un avironneur et une contre-plongée d’un escalier rue Paul Bert, les humains sont absents, et quand ils sont présents, il ne sont pas vraiment là. 

 

 

Phare Tréport par Clément Roussel
Maison de l'aviron par Clément Roussel

La géométrie est un élément fondamental de la patte stylistique du photographe. “Je suis quelqu’un de très cartésien, très matheux. Je suis très à l’aise avec les chiffres, l'architecture, les formes, la géométrie, je cherche toujours un point de fuite, une composition. Composer une photo peut paraître simple mais c’est un exercice difficile.” Dans cette carte blanche, la géométrie est prégnante. À l’image des clichés dans le Palais de Justice d’Amiens ou des photos rectilignes du Pont Jaux (Compiègne) et de la Tour Perret dédoublée par un effet miroir. Le Samarien utilise essentiellement le noir est blanc qui est pour lui, un moyen d’approcher la photo documentaire, de faire ressortir les contrastes et la lumière, de faire ressortir les détails. “Comme je suis beaucoup dans l’émotion, c’est le noir et blanc que je vais chercher. Je n’arrive pas à faire transparaître ça dans la couleur. Le noir et blanc a presque un effet cathartique sur moi. J’aime bien aller chercher quelque chose de sombre, d’hyper contrasté.” souligne t-il.

Pont Jaux par Clément Roussel
Perret miroir par Clément Roussel

Avec son parcours éclectique et sa vision singulière de la photographie, Clément Roussel nous plonge dans son univers et sa personnalité à travers ses clichés. L’Amiénois n’a pas fini de nous transporter dans ses escapades urbaines à la quête d’un moment d’éclat et de structures écrasantes. Le Samarien devrait dans les prochains mois exposer de nouveau ses clichés dans la cité picarde. 

 

Site de Clément Roussel : https://www.clementroussel.fr 

Instagram : https://www.instagram.com/clement_roussel/

 

Ryad Hammoud

Crédit photo : Léandre Leber - Clément Roussel

amiens culture art photographie sarenza tourisme carte blanche Autour de Clément Roussel photo documentaire

Ajouter un commentaire

Anti-spam